Le WING CHUN

Le Wing Chun est un art martial Chinois spécifiquement créé pour la gestion des distances de combat moyennes et courtes. Il a été popularisé par l’acteur Bruce Lee dans les années 70 puis, plus récemment, par les films consacrés à celui qui fut son professeur et que l’on considère comme le dernier « Grand Maître » du Wing Chun : Ip Man.

Comme souvent dans l’empire du milieu, histoire et légendes se mêlent pour nous donner une image assez confuse de la raison d’être de cette « boxe ». Si nous nous attachons aux faits purement historiques, nous savons que le Wing Chun était, à partir du XVIIIème siècle, pratiqué par les femmes des Hakkas, une ethnie Chinoise du sud de la Chine. Mais rien ne nous renseigne davantage sur son origine surtout si l’on met de côté les versions de chaque maître (ou pseudo maître) qui, bien entendu, cherchera à arranger son histoire pour qu’elle le place en digne héritier de la « vraie tradition ».

Ce qu’il est laissé entendre dans la plupart des récits, c’est que cet Art Martial a été initialement créé par et pour les femmes. Le côté féminin est ici mis en avant pour revendiquer que l’opposition physique n’est pas la première carte que le Wing Chun demande à ses adeptes de jouer au sein de la dimension martiale. Cependant, le développement de la sensibilité tactile, la connaissance de la géométrie du combat, l’assimilation des lois biomécaniques, la coordination gestuelle, la finesse technique, la mobilité, l’unité corporelle, la précision, la vitesse, l’explosivité, l’équilibre constant des actions et des réactions sont au premier plan.

Au-delà de ces éléments, il ne faut pas perdre de vue que le Wing Chun est un art martial traditionnel et qu’il est donc bien plus qu’une simple méthode de combat. Il cache un enseignement riche permettant à la personne qui s’y intéresse de suivre un parcours initiatique l’amenant à devenir la meilleure version d’elle-même.

En savoir plus

Le WING CHUN aurait été créé au XVIIIème siècle sous l’occupation Mandchoue. La légende raconte qu’à cette époque, les temples bouddhistes Chinois devenaient peu à peu les berceaux de la rébellion MING.
On s’y entraînait aux Arts Martiaux dans l’optique de combattre les envahisseurs et ceux-ci ne tardèrent pas à le comprendre. Ils incendièrent bon nombre d’édifices religieux dont le fameux temple de Shaolin situé sur le mont SONG dans la province du HENAN (ou celui du FUJIAN selon les interprétations. Le problème, c’est que le seul temple SHAOLIN ayant existé dans le FUJIAN se serait trouvé dans la ville de Quanzhou et n’aurait aucun passé Martial).
Seuls quelques moines survécurent à l’incendie et parmi eux, cinq Grands Maîtres des sciences du combat. Aujourd’hui, ces cinq personnages sont désignés comme « les cinq anciens ». Ils seraient à l’origine de la propagation en Chine de l’enseignement de styles redoutables. L’un d’entre eux aurait été une femme du nom de NG MUI. Cette nonne bouddhiste aurait trouvé refuge dans un temple localisé dans les montagnes TAI LEUNG,  « le temple de la grue blanche ». Au cours de sa retraite NG MUI se serait prise d’affection pour une très jolie jeune fille du nom de YIM WING CHUN. Cette adolescente était la fille du marchand de TOFU du village voisin. Sa beauté naturelle lui valait l’admiration de tous les hommes et, malgré le fait qu’elle fut déjà promise en mariage, un propriétaire foncier du nom de WONG réclamait sa main avec insistance. Tous les moyens lui semblaient bons pour arriver à ses fins et lorsqu’il alla jusqu’à menacer YIM WING CHUN et son père de violence physiques, la nonne décida de recueillir la jeune fille afin de la protéger et de lui transmettre ses connaissances martiales.
NG MUI aurait alors constitué son programme d’entraînement à base de techniques misant davantage sur l’agilité et la vitesse plutôt que sur la force musculaire et pour cela, elle se serait directement inspirée des boxes du serpent et de la grue qu’elle avait longuement étudié au temple SHAOLIN.
Lorsqu’après plusieurs mois de formation aux côtés de la nonne guerrière,  la jeune fille eut atteint un haut niveau de compétence, elle regagna son village pour y défier WONG en combat. Sa victoire fut écrasante.
YIM WING CHUN se maria quelques temps plus tard à l’homme qui lui était destiné, un dénommé LEUNG BOK SAO. Certains disent que LEUNG BOK SAO maîtrisait lui aussi une science du combat originaire de SHAOLIN et qu’à eux deux,  ils affinèrent le système de combat légué par la nonne.
YIM WING CHUN serait morte assez jeune et c’est en son honneur que son mari, unique héritier de ses savoirs, aurait baptisé  de son nom la formidable méthode de combat qu’ils avaient constitué ensemble. Nous en profiterons d’ailleurs pour rappeler que WING CHUN signifie « printemps radieux » dans notre langue.
C’est donc ainsi que le WING CHUN « KUEN », « la boxe » de WING CHUN, serait née mais son histoire ne s’arrête pas là.
En effet, LEUNG BOCK SAO aurait enseigné le système à un homme appelé LEUNG LON GWAI, qui, à son tour, l’aurait transmis à un artiste de l’Opéra chinois du nom de WONG WA BOH.
On raconte que la troupe d’artistes dont faisait partie WONG WA BOH était en fait un groupe de rebelles. Ceux-ci se déplaçaient de port en port sur un navire baptisé HUNG SHUEN signifiant la JONQUE ROUGE pour présenter leur spectacle mais aussi pour commettre en toute discrétion, des actes de rébellion contre les Mandchous.
La légende nous dit que par un heureux hasard, l’un des « cinq anciens », Maître JEE SEEN, se trouvait lui-même à bord de ce navire. Il s’y serait engagé en tant que cuisinier et aurait formé l’un des membres de la troupe au maniement de la perche. Naturellement, ces connaissances vinrent compléter le WING CHUN de WONG WA BOH.
Puis le système fut transmis à un jeune médecin cantonnais du nom de LEUNG JAN. Ces talents de combattant le rendirent célèbre dans toute la province. LEUNG JAN officiait dans la ville de FOSHAN. Il y tenait une pharmacie situé à côté d’un bureau de change dont le tenancier, CHAN WA SOUN, devint son meilleur élève.
CHAN WA SOUN enseigna le WING CHUN jusqu’à la fin de ses jours, il fut même instructeur dans l’armée. Au cours de ses dernières années, il loua un local à une riche famille de FOSHAN, le clan YIP, pour en faire son École d’Arts Martiaux. L’un des jeunes fils du clan YIP émit le désir d’apprendre aux côtés de maître CHAN. Il fut accepté à la condition de payer lui-même ses leçons. C’est ainsi que le jeune YIP MAN, tout juste âgé de 13 ans, commença son initiation aux Arts Martiaux.
Maître CHAN mourut trois ans plus tard. YIP MAN déménagea alors à HONG KONG pour poursuivre ses études dans une école internationale. On dit qu’il y remporta de nombreux combats contre les élèves occidentaux adeptes de la boxe anglaise ce qui lui valu une solide réputation de bagarreur dans toute la ville.
Un jour, il fut défié par un vieil homme qui se présenta comme Monsieur LEUNG. YIP MAN accepta le défi mais dès le début du combat, il fut sévèrement mis hors d’état de nuire. Le vieil homme révéla alors son identité. Il s’appelait LEUNG BICK et était le fils de LEUNG JAN. Il fut, durant des années, le compagnon d’entraînement de CHAN WA SOON, le propre Maître de YIP MAN.
YIP MAN demanda alors au vieil homme de lui enseigner l’intégralité du système tel qu’il l’avait reçu de son Père LEUNG JAN. A l’âge de 24 ans seulement, YIP MAN avait atteint un haut niveau de maîtrise du WING CHUN. Il retourna à FOSHAN jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale puis revint à HONG KONG où il fut contraint en 1949, d’enseigner son art au public par manque d’argent. Il faut dire que YIP MAN était un consommateur régulier d’opium et il lui fallait absolument trouver une source financière fiable pour subvenir à ses besoins de drogue et assurer la survie de son clan.
YIP MAN devint le Grand Maître du WING CHUN et eut de nombreux élèves qui firent sa renommée. Parmi eux l’acteur BRUCE LEE qui lui assura une notoriété mondiale.
Le grand maître YIP MAN mourut en 1972 d’un cancer de la gorge mais le WING CHUN ne cessa de faire des adeptes jusqu’à devenir l’un des Arts Martiaux les plus pratiqués dans le monde.
Il faut rester très prudent avec les faits historiques propres à la vie en Chine car très peu d’entre eux furent consignés par écrit. Pour ce qui est des Arts Martiaux, chaque école, chaque Maître y va de sa version des faits en faisant en sorte d’arranger les choses afin de prouver une quelconque lignée, filiation ou descendance avec un Maître légendaire. Lorsque l’on recoupe les dates, les lieux, les personnages et les registres des villes et des provinces, on obtient de multiples incohérences et non sens.
Ce que l’on peut attester, c’est que le WING CHUN est un style typique des boxes du sud de la Chine et qu’il a de nombreux liens avec le style de la Grue Blanche. En mandarin, la boxe WING CHUN se nomme YONG CHUN QUAN et il s’avère que le district de YONG CHUN est considéré comme le berceau de la boxe de la Grue Blanche. Les boxes du sud de la Chine constituent une grande famille : HUNG GAR, CHOY LI FUT, Grue blanche (BAI HE QUAN), WING CHUN. Elles sont passées à TAIWAN et à OKINAWA où elles sont devenues le TO DE (« la main chinoise ») avant de devenir le KARATE.
A mon sens, il y a beaucoup à apprendre des styles anciens de KARATE tels que le GOJU RYU, que cela soit dans l’esprit ou dans la technique, car le KARATE Okinawaien constitue un héritage solide de ce qu’étaient les anciennes boxes Chinoises qui sont à l’origine du WING CHUN. Si je cite le GOJU RYU, c’est qu’il est le style le plus proche du style Chinois de la gGrue Blanche. Il aurait d’ailleurs été élaboré en partie sur les descriptions d’un manuel de cette boxe gardé longtemps secret et finalement révélé au monde sous le nom de BUBISHI. On dit aujourd’hui du BUBISHI qu’il est le livre fondateur du KARATE DO…

Le WING CHUN aurait donc été créé à partir de techniques issues de la boxe de la Grue Blanche mais également de celle du serpent du temple SHAOLIN.  Ce qui est certain, c’est que c’est un style épuré qui vise à former rapidement un combattant efficace. C’est là toute l’originalité du système.
Avant l’invasion Mandchoue et surtout avant l’incendie de leur temple, les moines bouddhistes du temple SHAOLIN n’avaient aucunement la volonté d’offrir au monde une méthode de formation guerrière mais plutôt un formidable outil de transformation et de développement personnel. L’objectif de la pratique était avant tout d’unir le corps et l’esprit et d’en acquérir la maîtrise. Cette quête passait par une longue purification de l’être, celle-ci constituant une condition à l’état de paix intérieure.
Par leur profonde compréhension des lois universelles, les moines savaient une chose : la guerre est l’indissociable polarité de la paix. L’un ne va pas sans l’autre. Aussi, en faisant de la guerre un art initiatique au service de la paix, ils furent totalement en accord avec les lois de l’Univers. Les moines de SHAOLIN mirent au point leurs fameuses « boxes » afin que celles-ci soient l’expression même de l’harmonie engendrée par l’équilibre entre le YIN et le YANG et surtout, il fallait que ces Arts Martiaux soient éducatifs.
La question centrale qui anima leur créativité martiale était simple : comment rendre un être fort ? Les enseignements bouddhistes Indiens leur avaient ouvert les yeux à ce sujet et ils savaient que le développement de l’être devait se faire sur trois plans : le plan physique, le plan mental et le plan spirituel. Une fois ces trois plans investis équitablement, l’être était doté d’une puissante énergie de vie capable d’élever sa conscience, de le libérer des attachements inutiles et des schémas de fonctionnement égotiques.
Il va sans dire qu’un tel processus de transformation intérieure ne pouvait s’établir qu’au prix d’un long travail acharné. Souvent celui de toute une vie. Le facteur temps est une clé sur la voie de l’accomplissement. Un arbre ne pousse pas en un jour. Rappelons d’ailleurs que le terme KUNG FU qui était employé en Chine lorsque l’on reconnaissait qu’une personne avait atteint un haut niveau de maîtrise d’une discipline et s’était de ce fait, accomplie, met au premier plan la notion de temps dans sa constitution idéographique.
Le WING CHUN, lui, n’a pas été créé dans le but d’être, en premier lieu, un Art d’accomplissement personnel et bien qu’il fut fondé sur les enseignements de SHAOLIN, son objectif principal était de fournir une méthode de combat efficace et rapidement assimilable au peuple chinois opprimé par les Mandchoue. Ce style a donc directement été constitué pour le combat réel rapproché. Il fallait former des rebelles capables de « renverser les QING pour réinstaurer les MING » comme le dit le célèbre proverbe Chinois sensé accompagner le salut des Artistes Martiaux de l’époque.
Lorsque l’on parle du WING CHUN comme d’un style « rapidement assimilable » il faut bien comprendre ce que cela signifie. Il serait une erreur de croire qu’en quelques leçons, on peut maîtriser cette science très avancée du combat. Non, si le WING CHUN est qualifié de rapidement assimilable c’est que, par rapport à la plupart des autres boxes Chinoises, l’intégralité du système est contenu dans un ensemble limité de formes.
Une forme est un enchaînement organisé de techniques contenant tous les principes d’un style. Derrière une forme se cache les secrets de la boxe. Ces secrets sont enseignés par le maître aux disciples méritants et doivent ensuite être intégrés par une longue expérience de la pratique. La plupart des boxes Chinoises revendiquent plus d’une dizaine de formes, il y en a même qui vont jusqu’à en afficher 70.
Le WING CHUN, lui, n’est constitué que de trois formes à mains nues, une forme au mannequin de bois et deux formes avec armes. Bien que ces formes soient peu nombreuses et relativement facile à apprendre, les maîtriser requière beaucoup de travail, de la patience, de la persévérance et de la détermination.
Le système commence donc par l’étude d’une première forme nommé  SIOU LIM TAO, la petite idée. Cette forme est la plus importante du système puisqu’elle en introduit les bases. L’étudiant y apprend les principes mécaniques et théoriques des mouvements classiques du style. Il apprend également à réaliser ses techniques dans l’espace en se référant à la constitution de son propre corps mais aussi à une ligne imaginaire verticale le séparant en deux parties égales, gauche et droite. Cette organisation gestuelle construira peu à peu sa structure personnelle en accord avec les lois imposées par le WING CHUN. Il va sans dire qu’une solide formation physique devra accompagner l’étude de ce premier niveau ainsi que la pratique de bon nombre d’exercices complémentaires comme des déplacements basiques ou des éducatifs techniques …
Savoir faire une forme ne signifie en aucun cas connaître le WING CHUN puisque chacune des formes du système renferme 108 clés cachées derrière chaque geste. Il ne suffit pas non plus de connaître par cœur ces 108 clés. Il faut avoir expérimenté et répété longuement chaque enseignement afin que ceux-ci aient passé la barrière du mental et soient appliqués instinctivement par l’étudiant. Cela demande beaucoup de temps et de travail.
Une fois le niveau SIOU LIM TAO acquis et maîtrisé, l’élève pourra accéder au niveau TCHEUM KIOU (souvent écrit CHUM KIU) qui signifie « chercher le pont ». Cette forme lui permettra de comprendre plus en détail comment le système fonctionne face à un adversaire puisque la structure personnelle qu’il aura construite au premier niveau sera directement appliquée dans l’étude du combat. Les coups de pied et des déplacements supérieurs lui seront également enseignés. Il affinera et compilera ses techniques en s’appuyant sur les précisions apportées par son professeur et accèdera à la transmission d’un tas de méthodes d’entraînement.
Le troisième niveau est divisé en deux parties. Il s’agit de l’étude du MOUK YAN DJOANG qui se traduit par mannequin de bois. Les soixante premiers mouvements et leurs secrets sont enseignés dès que le niveau TCHEUM KIOU est maîtrisé. Les 48 mouvements restants sont enseignés après l’étude de la 3ème forme à mains nues nommée BIOU DJI. Ils seront accompagnés d’une formation aux déplacements sur les MUI FA DJOANG ou « pot aux fleurs de prunier », c’est-à-dire un ensemble de rondins de bois plantés dans le sol afin de former une forme pentagonale. Par l’étude du mannequin de bois, l’étudiant développera sa capacité à diriger sa force dans un objet stationnaire, à utiliser les angles et la distance ou encore à adhérer aux bras adverses avec dextérité.
BIOU DJI, la forme des doigts transperçants, constitue le 4ème niveau du système. C’est à ce niveau que les techniques les plus dangereuses du WING CHUN sont enseignées. De profonds savoirs y sont divulgués comme le travail de l’énergie interne et le combat contre plusieurs adversaires. Pour recevoir ce haut niveau d’enseignement, l’élève devra avoir prouvé sa loyauté, sa capacité à vivre en accord avec les vertus martiales et avoir posé les bases d’une vie spirituelle.
Puis vient l’étude des armes. D’abord le LOUK DIM BOUN GWEUN, la perche de six points et demi et les BOT DJOM DOH, les deux sabres courts « en huit » que l’on nomme parfois « sabres papillons ». Ces deux armes permettent, de part leur poids et leur emploi, d’accroître considérablement la constitution physique de l’étudiant et lui apprennent à effectuer bon nombre de combinaisons de mouvements coulés. Elles lui permettent également de véhiculer son intention au-delà de ses mains ce qui accentuera considérablement l’efficacité de ses techniques. A ce niveau, l’élève devra également prouver son aptitude à appliquer le système en combat libre.
Une fois le système intégralement maîtrisé, l’élève devra alors s’exprimer à travers l’Art. C’est-à-dire qu’il devra créer, jouer sa propre musique en accord avec les lois du système. Seule une longue et rigoureuse étude de chaque niveau le conduira à pouvoir se libérer et incarner instinctivement ce qu’est le WING CHUN. Aujourd’hui, le niveau des pratiquants de WING CHUN descend considérablement et ceci pour plusieurs raisons :

Tout d’abord, les derniers grands Maîtres disparaissent peu à peu emportant avec eux leurs trésors de savoirs.
Ensuite, les générations de pratiquants actuels ne peuvent pas ou ne veulent pas accorder le temps et les efforts nécessaires à une formation correcte et complète.
Puis, le travail de la condition physique nécessaire à la pratique du combat réel est négligé.
Il n’y a que peu d’intérêts pour les travaux énergétiques, la culture intellectuelle et l’intégration d’une vie spirituelle. Ces thèmes étaient pourtant essentiels dans les Arts Martiaux traditionnels chinois d’avant le communisme car les anciens savaient que l’apprentissage d’une science guerrière sans culture de l’esprit ne pouvait aboutir qu’à créer des êtres déséquilibrés, bestiaux, violents et irresponsables.
Enfin, l’évolution et la mixité des Arts Martiaux imposent au WING CHUN d’exprimer toute sa capacité d’adaptation car tout est dans le système. Cependant, trop nombreux sont les professeurs qui restent enfermés dans une structure figée sensée au contraire être libératrice. Du coup, ils sont incapables de revendiquer la valeur de leur style face à d’autres, même si la compétition contre les autres pratiquants n’a que peu d’intérêt pour un Artiste Martial.

Le WING CHUN de la CRCA constitue la base du WING CHUN enseigné par l’école AMES.
CRCA signifie CLOSE RANGE COMBAT ACADEMY. Cette école internationale de WING CHUN a été fondée dans les années 80 par Randy Williams que l’on surnomme « le SEEF », SEEF étant l’abréviation de SIFU.
Randy Williams est aujourd’hui désigné comme l’un des 10 plus grands Maîtres de WING CHUN au monde et comme une véritable légende vivante.
Né à la fin des années cinquante dans le Chinatown de Los Angeles, il eut l’opportunité de côtoyer dès l’enfance, de grands noms des Arts Martiaux Chinois et d’observer, le nez collé à la fenêtre, les cours du club que Bruce Lee y avait ouvert au 628 Collège Street Gym.
Très vite passionné par le KUNG FU et animé du profond désir de savoir se défendre il n’hésitait pas à solliciter les Maîtres habitants dans le voisinage afin qu’ils acceptent de lui enseigner leur art. Le jeune Randy essuya pas mal de refus jusqu’à ce qu’un certain George YAU CHU, un expert en WING CHUN, accepte de le prendre comme élève à la seule condition qu’il sache parler Chinois. Après quelques mois d’étude intensive des bases de la langue, Randy, alors âgé de 13 ans entra dans le cercle des élèves du Maître.
Durant sept ans, Georges YAU forma rigoureusement et sévèrement son jeune apprenti aux rudiments du WING CHUN mais également aux bases de la médecine chiropratique Chinoise et à la pratique de soins à base de plantes médicinales. C’est en 1979, à l’âge de 20 ans que Randy fut élevé au rang de SIFU par son propre Maître et introduit auprès d’autres professeurs. Il  put ainsi recevoir les enseignements d’illustres pratiquants tels que HO KAM MING et Ted WONG.
C’est sur la base de cette riche et longue expérience ainsi que sur sa propre vision du combat réel que Randy Williams construisit son style que je décrirai personnellement comme un solfège universel des Arts Martiaux. La CRCA témoigne d’une profonde connaissance de cet élément extrême et non figé qu’est le combat de rue de la part de son créateur mais surtout de tous les fondements hautement scientifiques du WING CHUN légués par YIP MAN. Le WING CHUN de Randy Williams est réaliste, il s’applique à toute situation et à tout type d’adversaire puisque son fondateur a su mettre en avant le fait que l’essence même de cet art est justement de pouvoir s’adapter à la brutalité et à la violence urbaine ainsi qu’à la mixité martiale qui constitue l’évolution des Arts Martiaux.
Pas un seul thème du combat rapproché n’est occulté ou mis à l’écart par la CRCA. Les frappes, les saisies, les projections, le combat au sol, la défense contre un ou plusieurs adversaires armés ou non…
Tout y est décortiqué et géré selon les principes du style WING CHUN car Randy Williams sait prouver mieux que personne la maxime qui dit que la théorie du combat en WING CHUN est illimitée dans ses applications et que tout est dans le système.
Ses hautes compétences dans le domaine de la gestion de la violence physique ont d’ailleurs propulsé le SEEF au 1er rang des gardes du corps des célébrités des années 80 et 90. Johnny Depp, Eric Clapton, Antonio Banderas, Al Pacino, Madona, Tina Turner, les groupes U2, Police ou, plus récemment, le groupe de métal FIVE FINGER DEATH PUNCH sont quelques unes des célébrités qui ont eu recourt aux services de protection du grand Maître.
Mais si le SEEF est connu pour sa carrière de bodyguard, il l’est encore plus pour avoir fourni le plus grand nombre de livres et de vidéos de qualité présentant et expliquant en détails l’intégralité de son système de combat. Ce qu’il a fait pour divulguer et préserver l’Art du WING CHUN à travers le monde durant plus de 40 ans, aucun autre professeur ne l’a fait !
Ses talents de pédagogue sont extraordinaires et s’il existe beaucoup de bons combattants dans le monde, les bons professeurs, eux, sont rares. Randy Williams sait formidablement transmettre sa passion avec intelligence, ingéniosité et humour. Ce n’est pas par hasard que la CRCA compte aujourd’hui de multiples écoles dans le monde entier. Elles sont dirigées par des élèves recevant un enseignement privé de sa part.
Ces élèves constituent ce qui s’appelle la « BARN », c’est-à-dire la grange ou l’écurie. Pourquoi ce nom ? Tout simplement parce que le SEEF réside dans un ranch en Pennsylvanie. Les chevaux sont sa seconde passion. Une immense grange de son ranch est destinée à accueillir ses élèves et est complètement équipée du matériel nécessaire à l’entraînement d’un combattant complet. Chaque élève ayant demandé à recevoir l’enseignement privé du SEEF devient donc membre de la « BARN » et peut s’y rendre périodiquement afin d’avoir le privilège de recevoir les savoirs du grand Maître.
La CRCA est une véritable famille. C’est à cela que l’on reconnait les grandes écoles de KUNG FU. Le Maître doit faire grandir ses élèves, les éduquer et les rendre autonomes. C’est ce que s’est appliqué à faire le SEEF tout au long des 40 années durant lesquels il a enseigné sa conception du combat rapproché. En montrant l’exemple, Randy Williams a su transmettre à ses élèves les qualités humaines essentielles qu’un Artiste Martial doit incarner.
Au début de l’année 2016, Randy Williams a légué son école à ses élèves afin d’approfondir une carrière de criminologue qu’il mène parallèlement depuis de nombreuses années. C’est son plus ancien élève, Sifu Mario LOPEZ, qui a pris aujourd’hui la direction de la CRCA.
Autrefois, Le WING CHUN de la CRCA se démarquait de celui des autres écoles classiques par son absence de conformisme. C’était un WING CHUN « de terrain » qui n’avait qu’un seul objectif, permettre à un individu de vaincre son ou ses adversaires en combat. L’efficacité, le réalisme et le bon sens étaient au premier plan. Mais ce n’était pas uniquement une formidable méthode de self défense, c’était aussi, comme tout Art Martial Traditionnel digne de ce nom, un merveilleux outil de développement personnel et une école de la vie.
Victime d’un système de graduation avant tout théorique, la CRCA a vu peu à peu, le niveau technique et physique de ses adeptes diminuer. Membre de la « Barn » depuis 2013 – Brice AMIOT, professeur de l’école AMES – j’ai décidé de rassembler la somme des connaissances issues de mes trente années d’expérience dans la pratique des Arts Martiaux  pour compléter le système que j’ai appris auprès de Sifu Randy WILLIAMS et ainsi élaborer mon propre style que je décris comme une extension du WING CHUN CRCA plus en accord avec ma vision personnelle de l’élément non figé qu’est le combat rapproché et plus en adéquation avec mes convictions en matière de formation physique et mentale. J’ai renoncé à nommer ce style car je n’ai rien créé, j’ai juste complété le WING CHUN de la CRCA de ce que je sentais personnellement digne d’intérêt que cela soit au niveau technique, au niveau théorique ou au niveau pédagogique. Cependant pour différencier cette vision plus personnelle du WING CHUN de celle de la CRCA je parle tout simplement, dans mes diverses interventions, du WING CHUN de l’école AMES.

Le WING CHUN de l’École AMES (WCA) est donc une école moderne de WING CHUN. Le terme « moderne » signifie que le WCA ne s’enferme pas dans l’enseignement classique de cet Art Martial et qu’il souhaite contribuer à son évolution. En effet, depuis les années 70 et en grande partie grâce à l’acteur Bruce Lee, les Arts Martiaux, les sports de combat et les méthodes de self défense se sont popularisés partout dans le monde. Ils ont été standardisés et adaptés pour être transmis au plus grand nombre par une voie sportive, cette voie étant la seule issue possible au sein d’une société dans laquelle les armes à feu étaient désormais utilisées pour faire la guerre. Peu à peu, les styles se sont mixés, et on a vu naître, dans les années 90, de nouvelles disciplines hybrides.
Cette mixité, Bruce Lee la pratiquait déjà de son vivant avec 50 ans d’avance. Il expliquait qu’elle était la conséquence naturelle de l’adaptabilité dont devait faire preuve un bon combattant. Bien qu’aujourd’hui, beaucoup de styles Martiaux traditionnels tendent à se moderniser, il réside une guerre perpétuelle entre les puristes et ceux qui veulent faire avancer les choses. Le monde du WING CHUN n’échappe pas à cette coutume.
Dans l’École AMES, notre avis est qu’il est indiscutablement essentiel d’assimiler les enseignements traditionnels car ils témoignent d’une longue expérience et d’un savoir faire ancestral. Mais il est également crucial, une fois ces enseignements acquis, d’évoluer avec son temps.
Il faut se souvenir que le WING CHUN a été conçu pour la guerre civile, pour le combat urbain et ce, à une époque bien différente de la nôtre. Dans la rue, on ne se bat plus aujourd’hui comme on le faisait en Chine au XVIIIème ou XIXème siècle. Les codes ont changés. Nous pensons que l’évolution du WING CHUN réside dans le fait que celui-ci doit être désormais universel et intemporel. Il ne s’agit pas de transgresser le système, mais d’exploiter la maxime qui dit que « La théorie du WING CHUN n’a pas de limites dans ses applications ».
Puisque le système est illimité, celui-ci doit permettre à ses adeptes de pouvoir faire face à n’importe quel type de combattant dans n’importe quelle situation. Le WING CHUN doit donc être ADAPTABLE.
L’adaptabilité est la qualité primordiale qu’un combattant doit acquérir car le combat est un élément muable, sans cesse en mouvement (SUN TZU le souligne d’ailleurs dans son traité sur l’art de la guerre lorsqu’il parle des « pleins et vides », ce que ne manqua pas de souligné Gichin FUNAKOSHI lorsqu’il décrivit les vingt préceptes directeurs du KARATE). Un Art Martial constitue une école de la vie et celui qui ne sait pas s’adapter à ce que la vie lui offre, vit une vie de victime.
Le WCA cherche donc à exploiter le grand registre des gestes contenus dans la science traditionnelle du WING CHUN face à un adversaire perpétuellement mobile, armant et désarmant ses techniques, créant des enchaînements et ayant des réactions logiques face à nos actions. Le WCA traite également tout un ensemble d’attaques non « conventionnelles », c’est-à-dire, non dictées par les règles mécaniques auxquelles un combattant issu du style WING CHUN doit se conformer. De ce fait, le WCA cherchera aussi à fonctionner face à des mouvements issus des boxes de rue ou des sports de combat. Dans le WCA, le ou les adversaires qui attaquent n’ont pas toujours de cadre technique imposé, pas forcément d’attitude à respecter, pas obligatoirement de convention à suivre.
Le WCA, tout comme la CRCA, ne rejette aucun domaine d’étude (combat debout, au sol, contre un adversaire armé, contre plusieurs adversaires …). Il tire de grands enseignements de ce qui fonctionne parfaitement dans les autres styles Martiaux et ne rejette aucune technique ni aucune méthode d’entraînement à condition que celles-ci puissent être appliquées en accord avec la théorie et les lois mécaniques liées au WING CHUN et surtout qu’elles soient réalistes.
En plus des distances courtes, le WCA explore les distances de combat moyennes et longues. De ce fait, le registre classique des techniques du WING CHUN, une fois maîtrisé, se voit adapté à ce type de distances. Le travail de la dextérité des jambes est extrêmement rigoureux car l’allonge est un atout souvent décisif en combat. Une jambe étant plus longue qu’un bras, nous jugeons qu’il est primordial qu’elle soit aussi rapide, agile et précise que celui-ci.
Enfin, le WCA impose une formation graduelle sur trois axes à l’ensemble de ses adeptes : une formation physique, une formation théorique et une formation technique. Ses trois thèmes sont indissociables et complémentaires.