Le Tai Chi Chuan (Le Taijiquan)

Tai Chi Chuan

Tai Chi Chuan ou Tai Chi est un terme qui évoque, chez la plupart des occidentaux, des images de vieilles personnes asiatiques qui gesticulent lentement dans la nature, habillés de pyjamas de soie blancs. Immédiatement une flûte et une légère brise viennent accompagner cette vision parfaite de la maîtrise et de la sérénité. Tout le folklore véhiculé par le cinéma ou l’industrie du « bien-être » jaillit à la simple évocation du terme Tai Chi. Cependant, lorsque nous souhaitons avoir une explication précise de ce qu’est cette discipline, nous obtenons souvent un discours qui masque sa confusion à l’aide de concepts spirituels empruntés au Taoïsme qui avouons-le, est très loin de notre culture. Tachons donc, en quelques lignes, de poser les éléments essentiels qui permettront à un occidental de comprendre ce qu’est ce « Tai Chi ».

Qu'est-ce que le Tai Chi Chuan ?

« Tai Chi Chuan » désigne un art martial Chinois et non une gymnastique douce comme on le prétend souvent. La pratique est essentiellement devenue un outil d’entretien de la santé mais il faut savoir que le Tai Chi Chuan était autrefois bien différent de ce que nous connaissons aujourd’hui sous ce nom. En effet, cet art martial constituait, à l’origine, la quintessence de connaissances reliant le mouvement guerrier, les lois de la circulation de l’énergie vitale à travers la bio mécanique humaine, le souffle et la concentration de l’esprit. Il se veut être une expression martiale des concepts Taoïstes qui considèrent l’être humain comme un microcosme. La particularité de cet art martial est qu’il impose une extrême lenteur dans l’assimilation des gestes techniques et ce, afin de permettre à ses adeptes de pouvoir accompagner ces gestes d’une respiration consciente et d’une intention claire. Avec l’expérience, la pratique s’accélère jusqu’à devenir explosive.

Que signifie Tai Chi Chuan ?

On le traduit généralement par « boxe du grand faite suprême ». En occident, la mauvaise transcription purement phonétique du terme a souvent entraîné une erreur d’interprétation du sens des sons qui le composent. Certains ont dit Tai, c’est le corps, Chi, l’énergie et Chuan la boxe. La déduction était facile : Tai Chi Chuan = « boxe de l’énergie dans le corps ». Sauf que le terme exact est Taiji Quan en pinyin, et si Quan désigne effectivement une boxe, ou plus exactement, un art martial, Taiji désigne une loi selon laquelle fonctionne notre univers en constante mutation et dont découle l’existence, au sein de chaque manifestation, de deux polarités indissociables et complémentaires.

Comment s'apprend le Taijiquan ?

Tout dépend de ce que l’on recherche. On trouve de nombreux cours de Tai Chi Chuan à droite et à gauche et malheureusement, de nombreuses personnes s’improvisent « prof. de Tai Chi ». Si votre souhait est de trouver une activité de type loisir qui vous permettra d’entretenir en douceur votre appareil locomoteur tout en respirant plus consciemment que d’habitude, je dirais qu’en allant n’importe où au hasard, vous avez de grandes chances de tomber juste. Ce sera sûrement un de ces cours standards dans lesquels vous suivrez les déambulations d’un professeur qui ne vous expliquera pas grand-chose au sujet de ce qu’il fait, ne le sachant pas vraiment lui-même, mais qui vous vantera les bienfaits des tisanes aux plantes et des bains dérivatifs tout en niant l’origine martiale de la chorégraphie vide de sens qu’il vous vendra mais au moins, vous aurez ce qui correspond à votre recherche.

Si vous souhaitez accéder à une dimension plus riche et plus authentique, il vous faudra éviter les pièges du format « bien-être » vendu dans les clubs de fitness et les maisons de la culture. Vous devrez rechercher un professeur diplômé d’une école reconnue pour son attachement à une transmission traditionnelle de l’Art. Ce professeur devra vous enseigner méticuleusement un art martial composé de postures, de déplacements, de frappes des membres supérieurs et inférieurs, de saisies, de pressions, de poussées, de luxations, de projections… Il devra vous démontrer les nombreuses applications de chaque mouvement référencé dans le registre du style de Tai Chi Chuan qu’il enseigne. Il devra vous éveiller à la notion d’unité corporelle, vous amener à développer votre souplesse, votre ressenti, votre coordination, votre équilibre, vous initier à la petite et à la grande circulation céleste (la base de la formation énergétique) et vous fournir une explication claire des principes philosophiques indissociables de la pratique. Il vous fera travailler autant seul qu’avec un partenaire.

Qui peut pratiquer le Taijiquan ?

N’importe qui si l’on parle de la discipline purement chorégraphique qui est principalement promue sous le nom Tai Chi depuis les années 80 en France. N’importe qui, à condition de ne rien y connaître et de vouloir intégrer un groupe de relaxation/respiration en mouvement. C’est d’ailleurs la motivation première des personnes qui entreprennent la recherche d’une école de « Tai Chi » : se relaxer, être « zen ».

Si l’on parle de Taijiquan, c’est-à-dire de l’art martial traditionnel Chinois dont la fonction est de fournir un outil de transmutation complète de l’Être, c’est différent. Il faut déjà avoir un intérêt pour les arts martiaux ! Il faut ensuite avoir la volonté d’étudier une voie de maîtrise personnelle (maîtrise du corps, de l’esprit, de l’énergie). Il faut avoir pour objectif d’améliorer sa santé en s’en responsabilisant. Il faut avoir une certaine expérience de la vie pour comprendre les fondements philosophiques qui sont à l’origine de la conception du Taijiquan  (35-40 ans est l’âge idéal pour commencer). Il faut avoir du temps à lui consacrer très régulièrement car c’est un art, et un art s’assimile et agit sur nous grâce à la répétition ! Il faut être au fait de l’existence d’une dimension énergétique de nous-même et être conscient que cette dimension se découvre en explorant la matière, c’est-à-dire le corps et ses lois mécaniques. Il faut être prêt à fournir des efforts physiques et des efforts de mémorisation des gestes techniques. Il faut être patient et persévérant, bref, comme pour l’étude de tout art, il faut être prêt à s’investir ! Le Taijiquan ne peut pas être considéré comme un sport-loisir au même titre que l’aqua gym ou la randonnée.

Quel intérêt y-t-il à pratiquer le Taijiquan en particulier ?

L’intérêt principal est la santé, bien entendu car l’objectif de la pratique du Taijiquan est bien de faire circuler l’énergie de vie en nous en appliquant un ensemble de lois universelles à l’intérieur comme à l’extérieur du corps par la concentration, le souffle, l’intention, le relâchement, l’unité mécanique dans le geste martial et la recherche de l’équilibre dans le changement. Cela demande généralement une rééducation complète de l’Être que les occidentaux ne sont pas toujours prêts à mettre en œuvre car en termes de santé, il est plus facile et habituel pour eux de se déresponsabiliser et de masquer les problèmes à l’aide de subterfuges plutôt que de s’atteler à corriger les déséquilibres engendrés par leurs modes de vie.

Le second intérêt est l’acquisition de qualités de souplesse, de coordination, d’agilité, de mémorisation.

Le troisième est l’assimilation, avec les années et l’expérience d’une pratique authentique, d’une science martiale subtile, très agréable à exercer avec un partenaire.

Le quatrième, qui paraîtra un peu flou pour le novice, c’est la perception progressive du corps énergétique (le nôtre d’abord et celui des autres par la suite) que nous pouvons influencer.

Taijiquan, comment en savoir davantage sur le sujet ?

Je conseille vivement à la personne en recherche d’authenticité, de se procurer les ouvrages du Dr Yang Jwing Ming sur le Taijiquan (aux éditions Budo) mais également celui de Jean Gortais (aux éditions courrier du livre).

Brice AMIOT pour A.M.E.S.